Nous avons à peine eu le temps de nous remettre à dépenser que le second confinement a stoppé toutes velléités sur le sujet. Les voyages, les restaurants, la garde-robe : autant de thématiques auxquelles nous consacrons volontiers une partie de nos revenus en temps normal mais qui semblent bien lointaines en ces temps moroses.
À fin octobre, les français ont accumulé plus de 100 milliards d'euros sur leurs comptes courants et des placements sans risque depuis le début de l’année. Pour ceux dont la situation n’est pas en jeu et/ou qui ont la chance d’avoir un patrimoine financier conséquent, c’est finalement de l’argent en plus qui dort sans rendement... en attendant....en attendant quoi finalement ?
- La garantie que la fin du monde n’est pas si proche ? Dans tous les cas, le patrimoine financier ne sera plus un véritable sujet. Et pour ceux qui cherchent le timing exact, ne pas hésiter à se référer à l’horloge de la fin du monde créée en 1947.
- Un changement de vie ou de résidence principale ? Cela semble être un vrai sujet pour beaucoup. Il reste encore à définir le planning, le financement et les échéances liés à ces grandes décisions.
- Un retour à l’ “état normal” de l’économie mondiale ? Cela prendra du temps, si tant est qu’une normalité existe encore sur le sujet. Cette période de “normalisation” reste une période d’opportunité que les entreprises saisissent pour s’adapter et se développer différemment. Aucune raison donc de ne pas en profiter pour placer son épargne.
- Le moment idéal pour placer au mieux son argent ? Nous le répétons à chaque fois que nous le pouvons : il n’y a pas de timing idéal et les meilleurs points d’entrée se retrouvent uniquement dans le rétroviseur des commentateurs.
- Le retour de la rentabilité des fonds euros ? N’y comptez pas trop à court/moyen terme. Les taux bas sont là pour quelques temps encore et les fonds euros de vos compagnies d’assurance ne sont pas prêts de reprendre les couleurs d’antan.
- Le fait qu’une partie importante de la population autour de vous ait commencé à ré-investir ? C’est hélas ce que l’on constate trop souvent. Une fois qu’une partie significative des investisseurs est revenue sur les marchés, elle entraîne l’autre partie dans un mouvement moutonnier, rassurant mais pas vraiment optimal pour eux.
La gestion financière est avant tout un exercice de discipline. Il n’y a pas de martingale ni de tuyaux, ni de génie, ni de sauce secrète sur le sujet. La vraie difficulté est que nous sommes pleins de biais cognitifs qui s’en donnent à cœur joie en cette période complexe et nous empêchent d’optimiser les rendements de nos patrimoines financiers.
La théorie dite du «cerveau bayésien» nous explique que nous passons notre temps à élaborer des croyances sur le monde qui nous entoure et à en générer des anticipations. À chaque fois que notre intellect décèle un écart entre notre croyance et notre perception, cela génère des erreurs d’interprétation et nous oblige à remettre à jour nos modèles de pensée.
La crise sanitaire a impliqué des mises à jour violentes en nous faisant passer d’une grande insouciance à une angoisse permanente, plusieurs fois en très peu de temps. Si certains particuliers ont profité de ces derniers mois pour investir à bon compte, il est compliqué pour une grande majorité d'entre nous de s’extraire de l'atmosphère pesante actuelle et d’interpréter positivement les signaux qui se multiplient d’une sortie de crise prochaine.
Rappelez vous que laisser dormir son épargne en sachant que vous n’en aurez pas besoin à court terme est une décision en soi. Souvent prise par défaut, elle ressemble à une forme de “phobie financière”, comme est apparue ces dernières années le concept de “phobie administrative". Pour éviter ce type de syndrome et les regrets qui vont avec, imposez-vous des routines systématiques pour vos placements. Elles mettront votre épargne au travail de manière régulière et sans vous faire emporter par l’ambiance du moment, rarement bonne conseillère dans notre domaine.
Comme le disait si joliment Alberto Moravia dans L'Ennui :
“Toutes nos réflexions, même les plus rationnelles, naissent d'une donnée obscure du sentiment. Et il est moins facile de se libérer du sentiment que des idées : celles-ci vont et viennent mais les sentiments demeurent.”