CHRONIQUE. Depuis plusieurs semaines, la souveraineté européenne est redevenue un sujet central. Si cela s’est d’abord manifesté dans le domaine de la défense nationale, l’intérêt pourrait bien s’étendre à d’autres sphères de l’économie. La BCE nous en donne un bel exemple avec l’euro numérique.
Par Olivier Malteste
Cela fait désormais près de cinq ans que la Banque centrale européenne travaille à la mise en place d’un euro numérique.
L’idée est de proposer une version électronique de l’euro, une monnaie numérique émise et garantie par la BCE, accessible via une application ou un portefeuille digital, et ayant la même valeur que les pièces et billets traditionnels.
Chaque citoyen européen pourrait ainsi effectuer des paiements dans les commerces ou envoyer de l’argent à ses proches, sans passer par un compte bancaire classique ni utiliser une carte de crédit.
Cet euro numérique ne serait pas une “crypto-monnaie” comme le Bitcoin puisque là où ces dernières reposent sur des technologies décentralisées, l’euro numérique serait, lui, entièrement centralisé et adossé à la solidité de la BCE.
Mais alors, en quoi cet euro numérique diffère-t-il des euros dématérialisés que nous utilisons déjà grâce à nos cartes bancaires par exemple ?
La souveraineté devient un fil rouge
Avez-vous remarqué que l’ensemble de nos paiements dématérialisés transite aujourd’hui par des acteurs américains ? Qu’il s’agisse de Visa, Mastercard, American Express, ou encore d’Apple Pay, Google Pay, voire PayPal.
Que se passerait-il si, pour une raison géopolitique, les États-Unis décidaient de ralentir ou bloquer certaines transactions ? L’impact sur l’économie européenne pourrait être considérable.
Un tel scénario peut sembler hautement improbable car nous ne serions pas face à une absence de soutien de la part de nos alliés historiques mais à un véritable acte d’hostilité directe.
Néanmoins, nous entrons dans une période où la souveraineté devient un fil rouge, fil rouge qui a notamment permis des hausses budgétaires impressionnantes dans la défense, et même l’Allemagne s’est affranchie de sa rigueur budgétaire historique !
Ainsi, même si le risque d’un affrontement direct avec les États-Unis reste très marginal, la question de la souveraineté des moyens de paiement a été posée explicitement par Philip Lane, économiste en chef de la BCE, certainement dans le but de faciliter l’avancée du projet.