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La Longue Vue #10 - L’Homme de Rio

La Longue Vue #10 - L’Homme de Rio

Cet été, vous pensiez avoir évité toute évocation des Jeux Olympiques de Rio. C’est raté. Les JO à peine clôturés, nous en profitons pour en tirer une perspective de long-terme. Les Jeux de l’ère moderne sont une mine (d’or) pour l’analyse statistique car ils couvrent une longue répétition d'évènements identiques. On peut donc en tirer des tendances persistantes. Soyez rassurés, il ne sera pas question de mes souvenirs d’enfance, ni de généralités caricaturales à partir d’anecdotes choisies. Vous n’êtes pas sur France2, laissons simplement parler les chiffres.

Tout d’abord, la répartition des médailles et la localisation des Jeux d’été reflètent assez bien l’équilibre géopolitique de chaque décennie depuis 1896¹. Les Empires coloniaux britannique et français reculent progressivement face à la montée des Etats-Unis puis de l’Allemagne. Les deux nations industrielles dominent clairement les années 30. Après 1945, Soviétiques et Américains se partagent un tiers des médailles. Après la dissolution de l’URSS, c’est la Chine qui entre dans le duo de tête, mais celui-ci ne capture désormais que 20% du total dans un monde moins polarisé.

Perspective séculaire

medailles


Ensuite, l’analyse du taux de succès (TS) d’une nation, défini comme le nombre de médailles par dix millions d’habitants par olympiade, indique qu’il existe des recettes pour gagner.

  • Le TS moyen est de 1,3 et accueillir les jeux le multiplie par 3.
  • Le niveau de vie est un second facteur positif. Néanmoins, difficile de conclure s’il est le déterminant direct (infrastructures, temps disponible à la pratique sportive, etc.) ou indirect via ses conséquences sur les conditions sanitaires (état de santé, etc.).
  • Les régimes communistes d’influence soviétique (URSS, RDA, Hongrie, Bulgarie, Roumanie, etc.) sont de loin les régimes politiques les plus efficaces, même si les démocraties se placent honorablement.
  • Sans logique apparente, avoir une faible population et être insulaire est bénéfique. L’Australie, la Nouvelle-Zélande et les Caraïbes sont particulièrement doués avec des TS de 15 à 40 ! Les Caraïbes prises ensemble (Cuba, République Dominicaine, Bahamas, Jamaïque, etc.) font autant de médailles que la France depuis 1992, avec trois fois moins d’habitants et un niveau de vie bien moindre.
  • La régularité et l’ancienneté payent, la France fait ainsi bonne figure avec sa 5e place au classement historique. Son TS actuel de 7 reste au-dessus de la moyenne mondiale sans être exceptionnel, et il est comparable à celui de l’Allemagne et à la moyenne européenne.
  • La RDA détient le meilleur TS moyen à 49 entre 1968 et 1988, avec un record absolu en 1980 de 75 ! Au regard des performances dix fois moindre de la RFA sur la même période, on peut donc estimer que 90% des 400 médailles gagnées par la RDA l’ont été au détriment de 360 malheureux athlètes internationaux qui ne bénéficiaient pas des « bienfaits de la science socialiste ».
taux de succes

A partir de ces observations passées il nous paraît désormais probable que d’ici 2032 :

  1. L’Inde organise des JO, et qu’elle y récolte 30 médailles contre 2 en 2016.
  2. La Chine détrône les Etats-Unis, mais que leur cumul reste sous les 25% du total mondial.
  3. Des irrégularités soient décelées prochainement en Grande-Bretagne, qui est la seule nation européenne qui ait multiplié son TS par 3, et en Jamaïque qui atteint désormais régulièrement le TS de la RDA entre 1972 et 1976.
Il vaut mieux le Bronze pour être heureux, et l’Argent pour vivre longtemps ! Mourtaza

Enfin, la recherche universitaire nous éclaire sur le destin des pays organisateurs et celui des médaillés.

  • Les JO sont néfastes d’un point de vue économique et financier pour la ville organisatrice, en comparaison avec les autres villes candidates. Avec la surenchère imposée par le CIO, les coûts sont élevés et ils dépassent systématiquement les budgets prévus de 100% en moyenne. Les infrastructures construites pour les JO restent sous-utilisées par la suite et les conséquences indirectes sont le plus souvent nulles car les ressources mobilisées pour les jeux (main d’œuvre, financement, infrastructure, pouvoirs publics, etc.) se font au détriment d’autres secteurs d’activité. Les revenus, eux, proviennent principalement des droits TV et de sponsors, et non pas des retombées touristiques. Par conséquent, seuls les Jeux organisés pour un grand marché publicitaire comme les Etats-Unis peuvent être rentables. L’impact est d’autant plus négatif que le pays est petit et le niveau de vie est faible.
  • Il vaut mieux le Bronze que l’Argent pour être heureux, et il vaut mieux l’Argent que l’Or pour vivre longtemps ! L’étude des émotions des athlètes montre un fort taux de satisfaction chez les médaillés de Bronze, alors qu’il est faible chez les médaillés d’Argent. Cela se comprend avec la comparaison mentale faite avec l’alternative la plus proche : « ne pas avoir de médaille » pour le 3e vs. « gagner la médaille d’or » pour le 2e. En revanche, sur le long-terme, les médaillés d’argent s’y retrouvent avec une longévité de trois ans supérieure à celle des champions. Sur un échantillon d’olympiens américains de 1910 à 1948, on observe que les médaillés d’or font des choix de carrière malheureux qui nuisent à leur niveau de vie et à leur santé. La réussite -le plus souvent fortuite²- d’avoir été le champion d’un jour confond les athlètes dans leur capacité réelle et leur fait prendre plus de risque que de raison.

Coubertin avait donc raison, l’important aux Olympiades est bien « de participer et moins d’y vaincre que de s’être bien battu ». Enfin, pour conclure sur le tout en matière d’investissement, cela nous rappelle que :

  1. Ceux qui ont investi régulièrement depuis le plus longtemps auront accumulé le plus.
  2. Il y a une vraie satisfaction à exceller.
  3. Les résultats trop beaux pour être vrais sont le plus souvent… pas vrais.
  4. Une performance extraordinaire doit beaucoup à la chance et ne doit donc pas donner lieu à un comportement qui repose sur la répétition de ce type d’événement.

Nous parions donc que les gérants qui auront une performance très spectaculaire en 2016 connaîtront la gloire de l’instant, mais ne seront pas parmi les meilleurs sur le long-terme, contrairement à ceux qui se placent régulièrement sur le podium. Sur ce, rendez-vous dans un mois pour la publication de nos performances annuelles.

¹ Nous avons retiré de nos statistiques, la « mascarade outrageante » des JO de 1904 à Saint-Louis où les américains sont quasiment seuls à participer.

² 50% des recordman du monde ne sont pas champions olympiques


Dépense moyenne d'un utilisateur de Pokemon GO

en bref
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Mourtaza est l'un des co-fondateurs de Yomoni. Il a endossé le rôle de responsable des investissements jusqu'en 2019.

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