En annonçant que les États-Unis allaient se retirer de l’accord de Paris sur le climat, Donald Trump a fait plus pour le combat contre le réchauffement climatique, que n’importe qui et en particulier, plus que le très sérieux et Prix Nobel, Al Gore. Aussi juste qu’elle soit, une cause est parfois desservie par ses défenseurs et elle est mieux servie par ses pourfendeurs. Cela aura probablement été le cas du réchauffement climatique. En proposant une approche radicale sur les modes de vie, les écologistes de la première heure n'avaient pas réussi à fédérer autour d’eux, voire ils avaient suscité la crainte par association avec un recul du progrès technique. Au final, c'est par contraste à un personnage encore plus antagoniste mais en adversaire, qu’une majorité semble se constituer et faire passer l’Accord de Paris de la symbolique à la réalité. « Donald », sauveur de l’Humanité, ce serait un peu fort !
Le pari de Pascal
Pour ceux qui auraient à se décider sur l’origine humaine du réchauffement climatique, sachez qu’il est vain d’attendre la vérité scientifique ou d’espérer du débat public l'émergence d’une certitude sur le sujet. En revanche, le pari énoncé par Blaise Pascal au XVIIème siècle pourrait être bien utile :
Une échelle de temps différente
La démarche scientifique est très efficace pour faire avancer l’humanité sur le long-terme mais elle n’est pas armée pour le débat polémique de l’instant. Les scientifiques convergent lentement vers la vérité par élimination d’hypothèses qu’ils prouvent fausses. En revanche, il leur est impossible de prouver une affirmation.
La charge de la preuve
Les détracteurs sont mieux outillés pour défendre leurs thèses. La dialectique de l’industrie de la négation marche toujours de la même façon, bien codifiée par l’industrie du tabac. Elle met la charge de la preuve sur le camp opposé. La ligne de défense est imprenable : "Prouvez que le tabac est LE facteur critique pour les pathologies de chaque cas présenté comme victime des effets du tabac". L’autre camp a ensuite la tâche impossible de prouver qu'ils n'ont jamais été en contact avec d'autres produits nocifs ou cancérigènes durant leur vie. La négation du réchauffement climatique par cause humaine, fonctionne de la même façon. À ceux qui constatent une augmentation des températures, une augmentation du taux de CO2, une montée des eaux et une acidification des eaux de pluie, ils enjoignent de prouver qu'il n'y a pas d'autres facteurs qui puissent influer sur la température de la terre indépendamment de l’homme. La tâche est rude, puisqu'il faut le dire, la température a beaucoup varié dans des amplitudes plus larges que celles connues sur les cent dernières années, en particulier en fonction du cycle des taches solaires. Mais de ce côté-ci du débat, ne pas être en mesure de prouver son implication ne constitue en rien une certitude que l’Homme n’y est pour rien et qu’il n’y aurait rien à faire pour inverser la tendance, désormais largement visible sur les taux de CO2 dans l’atmosphère.
Tout à gagner, rien à perdre
Enfin, paraphrasant Blaise Pascal, et de deux choses l’une : ou vous croyez à l’influence humaine sur le climat, ou vous n’y croyez pas ; par ailleurs, ou l’activité humaine influence le climat ou ne l’influence pas. Il existe alors quatre possibilités :
- Si cette influence existe et que vous n’y croyez pas : vous regretterez amèrement de vous être trompé si vous vivez assez longtemps pour en voir les conséquences.
- Si cette influence existe et que vous y croyez : votre action durant votre vie, sera peut-être récompensée par le salut de l’humanité.
- Si cette influence n’existe pas et que vous y croyez pourtant : il en ira de même, vous n’aurez, en vivant ainsi, rien à gagner et un peu à regretter des précautions inutiles que vous auriez prises.
- Si cette influence n’existe pas et que vous n’y croyez pas : vous n’aurez, en vivant ainsi, rien à gagner ni rien à perdre.
En conclusion, dans la mesure où le coût de croire à notre influence et d’agir en conséquence n’est pas très élevé, il est rationnel de faire comme si la chose était avérée et que nous y pouvions quelque chose.
Comme notre janséniste du XVIIème , nous avons un parti pris évident sur la question qui ne sera pas invisible à nos lecteurs. Cette conviction part d’une perspective de long-terme comme il est de tradition dans cet édito de notre lettre mensuelle. Sur les 800 000 dernières années où le climat a pu être reconstitué à partir d’analyses des couches successives composant les calottes glaciaires, on observe des cycles longs de températures élevées et forts taux de CO2 suivis de baisses simultanées. Il n’y a aucune certitude entre simple corrélation et causalités probablement réciproques (i.e. les fortes températures pousseraient les océans à rejeter davantage de CO2, ce qui réduirait la radiation terrestre et augmenterait l’absorption d’énergie par la planète en maintenant une température élevée, et inversement). En revanche, ce qui paraît plus certain, c’est que le niveau de concentration de CO2 relevé ces cinquante et surtout ces dix dernières années est exceptionnellement haut alors même que l’activité solaire est bénigne. Il y a donc matière à s'interroger sur les causes et conséquences de cette anomalie qui statistiquement ne devrait arriver qu’une fois tous les 800 millions d’années...