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Un choc récessif inédit et des répercussions importantes sur les politiques économiques

La récession économique mondiale causée par l’épidémie de coronavirus au cours du premier semestre est exceptionnelle à la fois par son ampleur et par sa quasi-simultanéité sur l’ensemble de la planète. La violence du choc provoqué par plusieurs semaines de confinement ou de restrictions aux déplacements se traduira par un recul historique du PIB mondial en 2020, qui devrait avoisiner les 4 % en moyenne annuelle et en volume (du jamais vu depuis la grande dépression des années 30).

Face à ce choc, les politiques économiques ont généralement été ajustées de façon extrêmement rapide et massive. Des schémas relativement classiques ont été utilisés, mais certaines innovations ont également été introduites et des changements majeurs semblent même se dessiner dans le cas de la zone Euro. Enfin, la crise a montré les limites de la coopération internationale et accentué le déclin du multi-latéralisme, déjà amorcé depuis quelques années.

Une réaction d’urgence des banques centrales pour assurer le bon fonctionnement du système financier

Dans un premier temps, les grandes banques centrales sont intervenues pour soutenir le système financier international, brutalement frappé par la perspective d’une récession très violente et par son caractère totalement inédit. L’objectif de ces interventions d’urgence était d’assurer le fonctionnement le plus normal possible des marchés financiers et du secteur bancaire, c’est-à-dire, in fine, le financement des différents agents économiques dans un environnement marqué par une baisse brutale des revenus et une forte hausse de l’aversion au risque sur les marchés financiers.

Il s’agissait d’éviter la répétition d’un scénario « à la 2008 », où la faillite de la banque Lehman Brothers avait conduit à un blocage complet du système financier international durant plusieurs semaines et, in fine, à une chute brutale de l’activité économique réelle.

Pour ce faire, les banquiers centraux ont encore abaissé les taux directeurs (déjà très bas), élargi les sources de refinancement pour les banques et assoupli certaines règles prudentielles qui encadrent leur activité.

Elles sont également intervenues directement sur les marchés financiers pour soutenir les cours des actifs les plus menacés par la crise. Aux Etats-Unis par exemple, la Réserve Fédérale a rapidement annoncé pour la première fois un plan d’achat d’obligations privées à haut rendement, émises par les sociétés les plus risquées, et donc les plus vulnérables dans un environnement de récession économique.

Dans la zone Euro, après il est vrai qu’après quelques hésitations initiales, la BCE a réaffirmé son engagement auprès des états les plus durement touchés par la pandémie et les plus fragiles financièrement (l’Italie notamment) en intervenant directement sur les marchés secondaires de leurs titres de dette afin de leur permettre de continuer à se financer à des conditions normales.

Un relâchement massif des politiques budgétaires pour limiter le recul de la demande

Dans un second temps, les politiques budgétaires ont également été mises à contribution. Il s’agissait pour les gouvernements d’aider les agents privés, ménages et entreprises, à supporter la chute brutale des revenus provoquée par le confinement.

Les mécanismes mis en œuvre ont été multiples et variés suivant les pays, allant du financement direct (versement par l’Etat Fédéral de primes aux ménages américains les plus fragilisés) jusqu’aux garanties de prêts aux entreprises, en passant par des mécanismes exceptionnels (chômage partiel en France). Des plans de relance par la dépense publique ont également été adoptés dans de nombreux pays. Au total, l’impulsion budgétaire au niveau global atteint cette année des niveaux jamais observés. Toutes ces mesures ne permettront pas d’éviter une récession historique en 2020, mais il faut bien comprendre qu’elles en atténueront sensiblement l’ampleur.

En zone Euro, des avancées significatives : plus grande coordination entre politique monétaire et budgétaire, relâchement des contraintes et début d’intégration au niveau budgétaire

C’est probablement dans la gouvernance de la zone Euro que les changements induits par la crise du coronavirus apparaissent aujourd’hui comme les plus importants. On notera d’abord que face à la crise, la contrainte des ratios de déficit et d’endettement publics (les critères de Maastricht) semble avoir été quasiment abandonnée.

La BCE, en levant un certain nombre de contraintes à ses interventions sur les marchés secondaires de dette publique, a également franchi un pas vers un interventionnisme plus marqué. En encourageant les gouvernements nationaux et les institutions européennes à procéder à un relâchement des politiques budgétaires, la banque centrale européenne a encore renforcé le message de soutien donné par sa garantie d’un coût de financement faible pour les Etats de la zone. Longtemps seule à assumer un rôle de politique économique réellement pan-européen, la BCE n’a visiblement pas hésité à pousser les responsables européens à se doter d’instruments de politique budgétaire dignes de ce nom.

Plus impressionnant encore, la conclusion d’un accord de relance budgétaire européen annoncé à la fin du mois de juillet, après des négociations difficiles, semble avoir permis de faire sauter certains tabous qui semblaient insurmontables avant la crise du coronavirus. L’ampleur des mesures annoncées est considérable (un montant supérieur à 5% du PIB de la zone Euro), mais c’est surtout la mutualisation du financement qui constitue une révolution.

Si ces mesures sont pour le moment présentées comme exceptionnelles et temporaires, il est très probable qu’elles marquent une étape fondamentale de l’approfondissement de l’intégration européenne, qui sera certainement amenée à s’accentuer encore dans les prochaines années et décennies.

L’accélération du recul du multi-latéralisme et le renforcement des tensions sino-américaines

Si la coopération européenne semble avoir progressé durant la crise du coronavirus, on ne peut pas en dire autant au niveau international. En donnant une impression de « chacun pour soi », la gestion de la crise sanitaire semble même avoir accentué la tendance à l’affaiblissement du multilatéralisme, déjà à l’œuvre depuis plusieurs années au niveau international (les débats autour de l’OMS durant la crise sont de ce point vue très illustratifs).

Cette crise paraît même avoir encore renforcé la polarisation des relations internationales autour de l’affrontement sino-américain. D’un côté comme de l’autre, quoique de façons différentes, les conséquences politiques de la crise sanitaire risquent d’être importantes. Pour Donald Trump, le prix de sa gestion pour le moins « hasardeuse » pourrait être élevé, à quatre mois seulement des élections présidentielles.  Dans le cas de la Chine, c’est surtout sur le plan extérieur que les conséquences politiques de la crise pourraient être défavorables, sa crédibilité sur la scène internationale étant incontestablement affaiblie. A court terme, ces situations risquent bien de crisper un peu plus encore les relations entre les deux géants économiques mondiaux…

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