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L'illusion des classements de fonds

L'illusion des classements de fonds

De nombreux sites et applications permettent de trier les fonds selon leur performance passée sur un mois, trois mois, un an, cinq, dix ans…

L'approche typique d'un investisseur laissé à lui-même, c'est d'utiliser ce classement et d'espérer avoir des rendements similaires dans le futur. C'est une très mauvaise approche !

Premier écueil : faire la différence entre la chance et le talent

Rappelons une évidence : dans un classement, il y aura toujours un premier. Mais la vraie question, c'est de déterminer si le premier est premier du fait du hasard ou s'il a des chances de l'être encore dans le futur.

La réponse statistique est la suivante : compte tenu du nombre de fonds très élevé (Morningstar permet de trier parmi plus de 38 000 fonds !), les performances extraordinaires sont avant tout dues au hasard. Et s'il y a une part de talent, il n'est pas assez exploitable par l'investisseur particulier pour construire une stratégie d'investissement robuste.

Inutile donc de dépenser son énergie à chercher les meilleurs fonds...

Deuxième écueil : les classements rémunèrent la prise de risque

Dans les classements des meilleurs fonds, comme lors des concours boursiers, c'est avant tout la prise de risque qui est récompensée.

Dans un concours de portefeuilles boursiers virtuels, seuls les premiers gagnent des lots. Les participants qui arrivent dans le milieu du classement ont le même prix que le dernier : rien du tout. Un joueur a donc intérêt à oser les paris les plus risqués plutôt que de gérer comme un bon père de famille !

Pour un gérant de fonds, c'est un peu la même chose : il sait que le haut du classement lui amènera davantage de clients. Il a donc intérêt à tenter de se démarquer en prenant davantage de risque, parfois au détriment des clients existants.

Or, une gestion rigoureuse de son épargne personnelle doit plutôt inciter à chercher la faible volatilité plutôt qu'à tenter des "coups" indispensables pour atteindre la première place.

Troisième écueil : la malédiction de la collecte

Supposons tout de même que nous avons repéré un gérant star. Nous lui confions le soin de sélectionner les meilleures actions avec notre épargne. Il doit sa performance à ses choix avisés, sa capacité à repérer des valeurs méconnues, son anticipation non consensuelle des mouvements de marché. Il caracole en tête des classements, il est l'anomalie statistique du gérant réellement talentueux.

Fort de sa popularité, de nouveaux clients arrivent en masse. Tôt ou tard, le fonds devient trop gros pour pouvoir mettre en pratique les idées d'investissement du gérant. Il est obligé d'investir dans des idées de plus en plus classiques, de plus en plus proches des indices...

Savez-vous de quoi sont constitués les portefeuilles des plus gros hedge funds américains ? Apple, Facebook, Microsoft et Amazon. Des mastodontes que tout le monde connaît, des actions que n'importe quel adolescent pourrait citer spontanément si on lui demandait où il placerait son argent.

Pourquoi les hedge funds sont-ils investis sur ces titres ? Parce que leurs capitaux sont trop importants pour être placés sur des titres plus petits.

Avec tous ces nouveaux capitaux, ne pouvant plus apporter de valeur ajoutée à ses clients, la performance de notre pauvre gérant actif va donc converger vers la performance moyenne des marchés… Après frais, il sera même bien en-dessous : de la gestion quasi passive avec les frais d'une gestion active !

Les clients sont déçus. Ils retirent leur argent et partent investir sur le nouveau fonds star du moment. Et le cycle recommence...

Les frais sont le facteur le plus important

Les frais sont en réalité le principal déterminant de la performance d'un fonds à long terme : un fonds qui a gagné 10% l'année dernière ne gagnera pas forcément 10% cette année, mais un fonds qui prélève peu de frais aura toujours peu de frais. Les moindres frais lui donnent déjà une petite avance garantie par rapport à ses concurrents,

Les fonds indiciels à faibles frais comme les ETF ne cherchent pas à être en tête des classements. Ils cherchent à ce que l'investisseur en « ait pour son argent ».

Néanmoins, même si ce n'est pas un but recherché, leurs faibles frais leur permettent souvent de se positionner de façon durable dans le premier quartile des classements. Les investisseurs obsédés par les trois premières positions ne les voient même pas !

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CONTRIBUTEUR EXTERNE. Nicolas a passé 15 ans dans la gestion d'actifs et la finance d'entreprise. Il aime partager son expertise de façon pédagogique.

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