Ces termes sont souvent employés indifféremment.
Et pourtant, ils désignent deux réalités bien différentes !
Qu’est-ce que le rendement ?
En agriculture, le rendement désigne le produit de la terre rapporté à la surface cultivée.
Ainsi, en France, le rendement moyen d'un hectare de vigne est de 5 700 litres.
En physique, on parle de rendement d’un moteur : il est obtenu en divisant la puissance mécanique fournie par le moteur, par la puissance (thermique ou électrique) consommée.
Le rendement du moteur d’une voiture est proche de 40 % pour les moteurs thermiques, et près de 90 % pour les voitures électriques. Oui, dans un moteur à essence, 60 % de l’énergie consommée ne contribue pas à faire avancer le véhicule, mais est perdue en pertes diverses (liées aux frottements, aux échauffements…).
Le rendement consiste donc à rapporter ce qui est produit par ce qui permet de le produire.
En finance, le rendement désigne donc les revenus que l’on retire d’un investissement, comparés à la valeur de cet investissement. Le rendement est alors exprimé en pourcentage et en base annuelle.
Par exemple, en matière immobilière, le rendement locatif est le loyer annuel divisé par la valeur du bien. Un appartement dont la valeur est estimée à 100 000 € qui génère un loyer de 400 € par mois, soit 4 800 € par an, a un rendement annuel brut de 4,8 %.
Le rendement est exprimé à un instant donné. Si la valeur du bien augmente alors que le loyer reste identique, le rendement chute (et c’est une bonne nouvelle pour le propriétaire : il perçoit les mêmes loyers, mais réalisera une plus-value à la revente).
Sur le marché boursier, si une action a annoncé un dividende de 1€ par action cette année, son rendement peut s’élever, selon les jours, à 2% (si son cours est de 50€), à 1% (si le cours est de 100 €), à 10% (si le cours est de 10 €), et ainsi de suite.
Le rendement est donc inversement proportionnel au prix payé : moins vous payez cher, plus vous augmentez votre rendement.
Le rendement a un côté pratique : on sait combien on empoche au cours de l’année.
Le rendement peut paraître un indicateur sécurisant pour les investisseurs néophytes, mais il ne raconte qu’une partie de l’histoire. En effet, il occulte le risque, mais aussi la variation de valeur du placement.
Un rendement élevé est généralement synonyme de risque élevé, puisqu’il y existe forcément des raisons pour lesquelles le prix n’est pas plus élevé. Dans notre exemple du dividende de 10 %, cela peut signifier une défiance vis-à-vis de la pérennité de ce dividende dans les années à venir.
Ce qui compte, c’est surtout la rentabilité.
Qu’est-ce que la rentabilité ?
La rentabilité est une mesure bien plus complète que le rendement, puisqu’elle englobe l’intégralité des flux financiers dans le temps. On parle aussi de ROI (Return on Investment - Retour sur Investissement).
Pour obtenir la rentabilité, il faut cumuler, sur une période donnée :
- les revenus (loyers, intérêts, dividendes)
- et la variation de valeur de l’investissement, c’est-à-dire la plus-value ou la moins-value réalisée entre l’achat et la revente.
L’achat et la revente peuvent être théoriques : on peut utiliser la valeur de marché en début de période et la valeur potentielle de revente en fin de période.
Rendement et rentabilités n’ont pas de lien.
Il peut exister une multitude de situations, par exemple :
- Un appartement qui se loue à un loyer très bas, mais dont la valeur augmente régulièrement a un rendement faible, mais une rentabilité élevée,
- Le Bitcoin ne distribue aucun revenu, donc son rendement est nul. Cependant, il offre une rentabilité (positive ou négative !) liée aux variations de son cours,
- Le Livret A, c’est l’inverse : le capital ne bouge pas. La rentabilité est uniquement liée à son rendement (les intérêts versés chaque 1er janvier),
- Un prêt risqué à une entreprise spéculative (prêt à haut rendement) offre un rendement élevé, mais une rentabilité négative si l’entreprise fait faillite, du fait de la perte en capital,
- L’investissement dans des études ou une formation ne génère pas de revenus immédiats, mais est rentable sur le long terme,
- Certaines actions ou fonds d’investissement ne distribuent aucun revenu, mais capitalisent les bénéfices afin de faire croître la valeur de leur part. C’est le cas de Berkshire Hathaway, la holding de Warren Buffett. Ils peuvent donc fournir une forte rentabilité malgré un rendement nul.
Il est donc fondamental de tenir compte de ces deux composantes : rendement, mais surtout rentabilité.
Malheureusement, le CAC 40 tel qu’il est diffusé par les médias est exprimé hors dividendes (“nu”). En regardant sa courbe, on a uniquement la composante “évolution des cours”, mais pas son rendement. La courbe n’est donc pas représentative de la rentabilité réelle d’un investissement sur cet indice boursier. Il faut ajouter les dividendes pour voir comment s’est enrichi un investisseur. En attendant, les médias donnent une image dégradée du réel potentiel de l’investissement dans les marchés financiers.
Autre différence majeure entre rendement et rentabilité : la temporalité
La rentabilité, c’est donc le rendement + la variation des cours.
Mais il existe d’autres différences :
- Le rendement est une mesure instantanée (“telle action a actuellement un rendement de 5 %”), comme une photographie,
- La rentabilité est toujours liée à une période (“telle action eu une rentabilité de 10 % par an ces 5 dernières années”), comme une rétrospective.
La rentabilité peut s’exprimer en termes absolus (le placement a gagné 80 % sur la période) ou être ramenée à une année, via le calcul du Taux de Rendement Interne qui permet de normaliser les rentabilités afin de permettre des comparaisons.
Oui, le Taux de Rendement Interne mesure une rentabilité… Nous n’y pouvons rien !
Par exemple, on ne parlera pas d’un gain de 80 % sur 10 ans, mais plutôt d’un TRI proche de 6 %.
(Rappel mathématique : un gain de 80 % sur 10 ans, ne correspond pas à un TRI de 8 % par an, mais à un peu moins. En effet, il suffit de placer à 6,05 % pour obtenir une rentabilité de 80 % en 10 ans grâce aux intérêts composés, car 1,0605^10 = 1,8)
Calculer le TRI permet de comparer sur un pied d’égalité des placements qui n’ont pas les mêmes caractéristiques : une action, un indice boursier, un contrat d’assurance-vie, un placement immobilier, une SCPI démembrée, un terrain agricole, une voiture de collection…
Le TRI combine à la fois les revenus distribués et la variation de valeur. Et si vous investissez sur des placements qui demandent des appels de fonds (le Private Equity par exemple) ou des réinvestissements (travaux en immobilier…), le TRI peut aussi en tenir compte, là où le rendement instantané serait incalculable.
Attention toutefois : les TRI du passé ne préjugent pas des TRI futurs. Les gagnants du passé ne seront pas forcément ceux du futur. Et qui dit rentabilité élevée, dit généralement risque élevé.
En conclusion, comparez ce qui est comparable !
Pour bien comparer les placements :
- Lorsque vous comparez deux investissements à un instant t, vous pouvez comparer les rendements instantanés, mais gardez en tête que les rendements ne racontent qu’une partie de l’histoire. En outre, un rendement élevé est souvent synonyme de décote sur le prix d’achat, et donc de défiance face à un risque jugé élevé.
- Lorsque vous comparez deux investissements en rétroactif, vous pouvez comparer les rentabilités historiques, mais les performances passées ne présagent pas des performances futures ! Tenez aussi compte de vos besoins en flux de trésorerie (si vous êtes retraité, vous avez plutôt d’un placement qui vous apporte la sécurité d’un rendement régulier, même s’il est moins rentable).
Enfin, il faut aussi distinguer rentabilité brute et rentabilité nette. Ce sera l’objet d’un prochain article !